Les tactiques de l’interprète en langue des signes face au vide lexical : une étude de cas
Sophie Pointurier Pournin, ESIT, Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle, Paris
Daniel Gile, ESIT, Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle, Paris
RESUMÉ
Le lexique spécialisé de la Langue des Signes Française (LSF) est de taille très inférieure à celui du français, ce qui pose régulièrement problème aux interprètes. Quatre cours de contrôle de gestion auxquels participait un étudiant sourd interprétés par quatre interprètes professionnels ont été enregistrés, et les tactiques des interprètes face à des termes français n’ayant pas d’équivalent lexical en LSF ont été identifiées, énumérées et analysées. Les cas de vide lexical se sont avérés nombreux. Les tactiques employées renvoyaient souvent à des termes en français, ce qui n’est pas conforme à une norme sociolinguistique forte dans la communauté sourde française. Ce choix peut s’expliquer par le souhait des interprètes de répondre aux besoins de l’étudiant sourd, qui devait connaître les termes français lors des examens, et vient appuyer la théorie du skopos.
ABSTRACT
French Sign Language has a far smaller specialised lexicon than French, which poses regular problems to interpreters working between the two. Four management control sessions attended by a deaf student and interpreted for him by four professional interpreters were recorded, and the interpreters’ tactics when encountering the problems of missing signs in French Sign Language (‘lexical gaps’) were identified, counted and analyzed. Lexical gaps were found to be numerous in the corpus. The tactics often used elements of French spoken language, in contradiction with a strong sociolinguistic norm in the French deaf community. This can be explained by the interpreters’ wish to cater to the needs of the deaf student, who needed to know the French terms when taking exams, and is in line with skopos theory.
MOTS CLÉS :
Langue des Signes Française, vide lexical, interprétation, tactiques.
1. Introduction : le vide lexical dans l’interprétation du français vers la Langue des Signes Française
Comme d’autres langues des signes nationales, la langue des signes française (LSF) est une langue à part entière, qui a notamment son lexique et sa grammaire propres. Apparue initialement comme langue d’expression et de communication véhiculaire entre personnes sourdes, donc au sein d’une petite fraction de la population nationale, elle proposait une couverture lexicale des différents domaines de l’activité humaine bien moins étendue que le français et son vocabulaire n’évoluait pas quantitativement à la même vitesse que le lexique du français. La LSF ne compte en effet que quelque 6 000 signes standard référencés face à des dizaines de milliers de mots que l’on trouve dans les dictionnaires généraux de langue française et aux centaines de milliers d’unités lexicales employées dans les domaines de spécialité.
Cette inégalité quantitative entre les lexiques du français et de la LSF conduit naturellement à l’idée d’un ‘vide lexical’ dans la traduction du français en LSF1. En réalité, cette idée n’a rien d’évident, car des concepts ayant une forme lexicalisée dans une langue peuvent être ré-exprimés sous d’autres formes dans une autre, par exemple à travers des périphrases. Celles-ci sont largement utilisées dans toutes les langues, que ce soit quand un mot recherché n’est pas disponible chez le locuteur au moment où il en a besoin (c’est le fameux phénomène du ‘mot sur le bout de la langue’ bien connu des psycholinguistes) ou dans un contexte de traduction.
Dans les langues des signes et notamment en LSF, on a également recours à la scénarisation comme l’appelle P. Séro-Guillaume (2008), concept traductologique de prise en charge du discours qui fait appel aux notions de transferts de C. Cuxac, (2000) : dans le transfert personnel ou prise de rôle, le locuteur ‘devient’ l’entité dont il parle, personne, chose, animal ; dans le transfert de taille ou de forme, il décrit un objet par sa forme, sa hauteur, etc. ; dans le transfert de situation, il reproduit dans l’espace le déplacement d’un actant par rapport à un locatif stable. Dans les langues des signes, ces transferts prennent le plus souvent une forme visuelle. I. Fusellier-Souza (2006, page 75) note
un aspect remarquable dans la structure de toutes les LS, [à savoir …] le fait qu’à défaut de signes lexicalisés lors de l’expression de contenus informationnels difficiles à transmettre, les locuteurs sourds ont toujours recours à la stratégie productive de ‘donner à voir,’ en réactivant le processus d’iconicisation comme autre branche sémiologique exploitable.
Les langues des signes permettent donc par des procédés iconiques et par des mises en scènes imaginatives (ou scénarisées) d’exprimer le sens du discours visuellement sans nécessité de lexicaliser.
Et pourtant, dans les langues des signes et pour les mêmes raisons que dans les langues vocales, l’absence d’unités lexicales peut réduire l’efficacité de la communication. A fortiori, le vide lexical peut poser problème : lors d’une émission de L’Œil et la main, sur la chaîne de télévision France 5, pour rendre en LSF le concept de dyspraxie, il a fallu à l’interprète huit secondes et deux tactiques différentes : une périphrase ([gestion/corps] [gestion maladroite] [signe maladroit]), puis la présentation du mot D.Y.S.P.R.A.X.I.E. signe alphabétique par signe alphabétique. L’emploi d’un signe lexicalisé aurait fait gagner beaucoup de temps et économisé de précieuses ressources attentionnelles à l’interprète et aux téléspectateurs sourds.
Les sourds, présents dans de nombreux domaines de spécialité, ainsi que les interprètes qui travaillent pour eux, sont donc amenés à créer des codes et des signes là où ils font défaut : une personne sourde travaillant en laboratoire de microsoudure aura besoin de termes précis pour désigner un condensateur, un braser, un braser à vagues ; un étudiant sourd étudiant le contrôle de gestion aura besoin de termes pour désigner les immobilisations, les dividendes etc.
2. Le vide lexical et l’interprétation simultanée
En France, chez les interprètes en langue des signes et au sein de la communauté sourde signante, la question du ‘vide lexical’ est pourtant un sujet sensible. Un principe fort qui prévaut chez les interprètes pourrait s’énoncer ainsi : « Il n’y a pas de vide lexical, il n’y a que de mauvais interprètes. » Reconnaître le vide lexical est souvent perçu comme un manque de compétence linguistique. La création de correspondances lexicales ad-hoc pour un terme français non lexicalisé en LSF est vue comme un pis-aller, un aveu d’échec pour ne pas avoir su utiliser l’iconicité de la langue, c'est-à-dire trouver l’image, la mise en scène, le transfert qui pourraient exprimer ce même concept en langue des signes.
Pourtant, comme il est expliqué ci-dessous, l’interprétation simultanée sollicite lourdement les ressources cognitives de l’interprète, et l’absence d’une unité lexicale standard pour exprimer en langue d’arrivée (en l’occurrence, en LSF) ce qui est dénommé par un terme spécialisé en langue de départ peut grever lourdement sa performance là où elle ne serait pas très gênante dans un échange ordinaire entre signants.
Sur le plan cognitif, l’interprétation simultanée peut être représentée comme la superposition partielle d’opérations contrôlées, c'est-à-dire consommatrices de temps et de ressources attentionnelles, concourant à la réception du discours original, à la production du discours d’arrivée, et à des manipulations d’information en mémoire à court terme. Le Modèle d’Efforts de l’interprétation simultanée (Gile 2009, chapitre 7) s’articule autour de 3 « Efforts » de base, à savoir l’Effort d’Ecoute, que l’on rebaptisera ici Effort de Réception pour l’élargir à la réception du discours signé, l’Effort de Production et l’Effort de Mémoire, qui correspond à des opérations de stockage temporaire et de récupération d’informations linguistiques et extralinguistiques nécessaires à l’analyse et à la reformulation du discours original en langue d’arrivée. S’y ajoute un Effort de Coordination. Selon ‘l’hypothèse de la corde raide’ qui accompagne le Modèle d’Efforts, les interprètes travaillent souvent à proximité de la saturation cognitive. De ce fait, toute augmentation des besoins en ressources attentionnelles ou en temps de traitement des informations est susceptible de conduire à une insuffisance cognitive locale ou globale (Gile 2009).
Dans une telle situation, les correspondances lexicales inter-linguistiques dans les termes spécialisés offrent l’avantage d’une économie cognitive considérable par rapport aux périphrases, explications et autres procédés non automatisables tels que la scénarisation, et éloignent d’autant le risque de saturation cognitive.
3. L’innovation lexicale en LSF
Il n’existe pas de commissions officielles de terminologie en LSF pouvant recenser, réguler et faire évoluer la langue. Les techniques discursives de la langue des signes permettant au quotidien de s’exprimer sans recourir systématiquement à des signes standard, il n’y a pas eu d’urgence à créer des centaines de néologismes pour enrichir le vocabulaire spécialisé ou plus élaboré. Seuls quelques dictionnaires bilingues énumèrent des signes standard pour l’apprentissage de la LSF : le Dictionnaire bilingue LSF/français et quelques dictionnaires en ligne (Langue des Signes Française, Spreadthesign, LSF sur le Web …).
En conséquence, pour se doter de nouveaux signes et en l’absence d’instances de normalisation, la LSF doit souvent attendre une initiative privée correspondant aux besoins concrets d’une structure ou d’un étudiant en cursus universitaire pour répondre à des besoins lexicaux spécifiques. Malgré les possibilités qu’offre internet, il est rare qu’un glossaire ainsi établi réussisse à se diffuser au niveau national.
Parmi les initiatives institutionnelles françaises, on peut citer celle de la direction de la Cité des sciences à la Villette, qui, pour rendre accessibles les contenus des conférences et expositions au public signant, a mis en place une commission composée d’interprètes en LSF, de scientifiques et de guides sourds dont les travaux ont abouti à un certain nombre de termes qui ont été adoptés dans le lexique standard de la LSF, par exemple pour système solaire, planète, Saturne. Cette réflexion autour de la création de néologismes est aujourd’hui poursuivie par l’équipe qui a en charge de rendre accessibles en LSF les contenus scientifiques des évènements proposés. (Voir à ce sujet les archives du site internet de L’Œil et la main sur France 5 et l’interview de Guy Bouchauveau dans l’émission intitulée « créateurs de signes »).
Le travail de commissions de ce type a abouti à la mise à disposition de vidéo-guides en LSF dans plusieurs musées nationaux.
Autre exemple, l’ESBAM (Ecole supérieure des Beaux Arts de Marseille) a entrepris au moment de l’ouverture du cursus de l’école aux étudiants sourds en 2005 un projet de recherche intitulé « Dire en signes » qui regroupe une cinquantaine de professionnels sourds et entendants. Cette initiative avait pour objectif la création du vocabulaire en LSF nécessaire au suivi d’études d’arts.
Quelques glossaires spécialisés ont également vu le jour : Lex’signes (2008) référence de plus de 180 signes se rapportant au Moyen-Âge ([armure], [charrue], [hérésie], [abbaye], [sceau] etc.). Cependant, ces glossaires, qui ont une importante fonction pédagogique, ne sont pas nécessairement utilisables en situation d’interprétation. La majorité des signes proposés, souvent sous la forme de plusieurs vignettes (une ‘vignette’ correspond à un signe), sont davantage une explication qu’un signe synthétique au sens Saussurien du terme, et leur emploi est trop coûteux en temps d’énonciation (voir plus loin).
Ce travail fait en amont de l’interprétation ne concerne que très peu de domaines et laisse l’interprète seul face au vide lexical dans les nombreux secteurs de la vie où il intervient. L’essentiel de la création lexicale se fait donc par les interprètes eux-mêmes en situation, en consultation avec les personnes sourdes pour lesquelles ils travaillent. La diffusion des nouveaux signes est informelle et en grande partie aléatoire : elle dépend des contacts entre les interprètes et de leur attitude (en France, ils considèrent en général que l’enrichissement lexical de la LSF relève de l’initiative et de la responsabilité de la communauté des sourds signants et de l’adoption ou non d’un nouveau signe par cette même communauté). Selon Gache et Quipourt (2003),
(…) comme il n’existe toujours pas à l’heure actuelle d’instance de régulation linguistique institutionnalisée, et que les référentiels de la langue des signes sont seulement à l’étude, les interprètes ont dû se déterminer entre eux deux modèles de référence, à savoir les locuteurs sourds dont les compétences en langue des signes étaient validées par la communauté sourde ou bien ceux qui étaient reconnus par les entendants pour leur niveau de français. (…) En l’absence de normes, les interprètes en langue des signes se réfèrent généralement au vécu des locuteurs.
Par ailleurs, les interprètes en LSF sont tenus de respecter les normes sociolinguistiques de la communauté sourde majoritaire. Il se trouve que contrairement aux communautés sourdes étatsunienne et britannique, par exemple, elle est hostile à la dactylologie (qui consiste à épeler par signes le mot en langue vocale, en l’occurrence le français). Cette position iconiste et hostile à l’irruption de la langue vocale dans l’espace de signation est également relayée par les quatre écoles françaises d’interprétation en langues des signes, à l’université Paris 3, à l’université Paris 8, à l’université Lille 3 et à l’IUP de Toulouse le Mirail.
4. Tactiques de l’interprète de LSF face au vide lexical
Dans le cadre de ses travaux sur l’interprétation simultanée entre langues vocales, D. Gile énumère et analyse des tactiques auxquelles ont fréquemment recours les interprètes face à des « déclencheurs de problèmes » que sont différents phénomènes relevant du discours original ou des relations entre les deux langues (ou les deux cultures) concernées (voir notamment Gile 2009, chapitre 8). Dans l’hypothèse d’une sollicitation cognitive souvent proche de la saturation, l’absence de correspondances lexicales aisément accessibles entre la langue de départ et la langue d’arrivée constitue un déclencheur de problèmes potentiel si elle conduit l’interprète à une dépense supplémentaire en temps ou en ressources attentionnelles. A supposer que l’hypothèse de la corde raide s’applique également à l’interprétation en langue des signes, il apparaît intéressant d’examiner les tactiques auxquelles ont recours effectivement les interprètes de LSF face au vide lexical.
4.1 Corpus et méthode
Notre étude (à l’origine, un mémoire de Master 2 Recherche à l’ESIT – voir Pournin 2009) exploite l’enregistrement des prestations de quatre interprètes intervenant régulièrement au bénéfice d’un étudiant sourd, réalisé au Centre National des Arts et Métiers de Poitiers entre juin 2008 et avril 2009 sur quatre cours de contrôle de gestion de niveau master (environ une heure dix par cours). Un caméscope numérique était placé sur le coté de la salle de cours pour avoir un angle de vue assez large. L’étudiant s’est dit satisfait des interprétations et les parties concernées ont autorisé l’utilisation des enregistrements pour la recherche.
Il n’existe pas de glossaire français/LSF dans le domaine du contrôle de gestion. Les termes dans le discours français posant un problème de vide lexical ont été déterminés par les critères suivants :
- ne pas être référencés dans les dictionnaires existants ;
- ne pas avoir d’équivalence lexicale en LSF connue de l’étudiant sourd et des interprètes ;
- s’ils existaient en LSF et étaient connus de l’interprète ou de l’étudiant sourd dans une acception donnée, ils en prenaient ici une autre.
Les enregistrements ont été visionnés, les termes répondant aux critères ci-dessus ont été relevés et leur interprétation a été étudiée. 107 termes nécessitant une correspondance précise (par opposition à une approximation conceptuelle) et n’ayant pas d’équivalence standard en LSF ont ainsi été recensés conjointement par deux interprètes et l’étudiant sourd : 29 au premier cours, 38 au deuxième, 22 au troisième et 17 au quatrième. D’après l’étudiant, aucune de ses connaissances sourdes exerçant la profession de comptable ne connaissait d’équivalents lexicaux en LSF aux termes et expressions français relevés.
Pour chacun d’eux, nous avons enregistré signe par signe la manière dont chaque interprète les rendait : dactylologie/ français signé/ interprétation/ labialisation/ emprunt/ scénarisation/ etc.
4.2 Résultats
Dans son analyse des tactiques en interprétation simultanée, D. Gile (2009 : 211-212) postule l’existence de « lois » sous-jacentes qui en déterminent la sélection, dont la maximisation de la récupération d’informations et la minimisation des interférences (dans la mesure du possible, une tactique ne doit pas, pour transmettre une information, consommer du temps et des ressources attentionnelles au détriment d’une autre information). Il est intéressant d’analyser les tactiques identifiées dans la présente étude de cas au regard de ces lois.
Les tactiques observées dans notre corpus (voir tableau 1) font intervenir les techniques d’expression suivantes (la plupart existent en LSF indépendamment de l’interprétation, mais elles seront qualifiées de « tactiques » ici étant donné leur emploi spécifique face au vide lexical) : la labialisation, la dactylologie, l’emprunt adaptatif, la scénarisation, le français signé, la périphrase ou explicitation, la siglaison (initiales des mots, par exemple UVC pour Unité de Vente Consommateur ), l’énumération d’éléments suggérant un ensemble (par exemple « piano, guitare, violon, etc. » pour exprimer l’idée instrument de musique), la création d’un signe par sosie labial (le sens du signe est donné par la similitude de la prononciation labiale avec celle d’un autre mot français connu de la personne sourde, tactique plus fréquente dans la traduction de la LSF vers le français, provenant de la personne sourde, que dans l’autre sens).
Remarques :
- S’il n’y a que 107 mots pour 149 tactiques, c’est que la langue des signes est pluridimensionnelle et permet la simultanéité de diverses composantes (par exemple labialisation + signe, ajout de la dactylologie), et que les interprètes ont parfois eu recours à plus d’une tactique pour le même concept.
- Nous n’avons pas comptabilisé la tactique code 1ère lettre ou initialisation (qui consiste à dactylologier la première lettre du mot français en labialisant fortement celui-ci) ; dans le corpus, elle venait toujours en rappel à un concept déjà rendu par une première tactique et n’était qu’une tactique d’attente, le temps d’affecter un code ou signe au concept concerné.
Interprétation n°1 |
Interprétation n°2 |
Interprétation n°3 |
Interprétation n°4 |
Total |
|
Labialisation |
12 |
18 |
9 |
16 |
55 soit 34% |
Dactylologie |
7 |
2 |
15 |
33 soit 20% |
|
Emprunt à la LSF |
9 |
5 |
6 |
1 |
21 soit 13% |
Scénarisation |
4 |
6 |
2 |
2 |
18 soit 11% |
Français Signé |
3 |
6 |
5 |
14 soit 9% |
|
Périphrase |
1 |
6 |
2 |
1 |
10 soit 6% |
Représentation visuelle du support de cours |
1 |
3 |
4 soit 2% |
||
Signe-1ère lettre |
1 |
2 |
3 soit < 2% |
||
Siglaison |
2 |
1 |
3 soit < 2% |
||
Enumération |
1 |
1 soit < 1% |
|||
Sosie labial |
1 |
1 soit < 1% |
Tableau 1. Tactiques de traduction en LSF des termes techniques français ne possédant pas d’équivalence signée dans le corpus.
4.2.1 Tactiques fréquentes
(1) Labialisation du mot français (sans voix) : (55 occurrences)
La labialisation ne vient jamais seule ; elle accompagne un signe, une épellation.
On peut distinguer deux formes de labialisation : la forme standard, composante idiomatique de la langue des signes, et l’articulation sympathique, qui regroupe des mimes buccaux, des sons et autres mouvements de la bouche nécessaires à une communication idiomatique (Séro-Guillaume, 2005, p. 130-131).
Les labialisations observées dans notre corpus sont bien plus fréquentes et plus appuyées que ce que requiert habituellement une interprétation en LSF. Explication possible : les interprètes étaient conscients de l’utilité des termes français pour l’étudiant sourd, qui aurait à les reconnaître et à les utiliser dans des documents et des examens écrits.
Exemple interprète 2 :
« Agir à long terme ou à moyen terme » : [mur] + [loin devant] …. [mur] + [devant] + [moyen] furtivement esquissé de la main gauche, labialisé
« long moyen terme »
(2) Dactylologie : utilisation de l’alphabet manuel codé en signes (33 occurrences)
La dactylologie est une pratique qui ne s’utilise habituellement que pour épeler les noms propres n’ayant pas d’équivalent lexical en LSF, ou en dernier recours pour venir à bout d’une incompréhension inextricable. Les sourds n’étant pas tous à l’aise avec la langue écrite, il ne leur est pas naturel de saupoudrer la LSF de mots dactylologiés (à la différence de l’usage dans la langue des signes américaine). Dans ce corpus elle est pourtant l’une des techniques les plus fréquentes. Elle permet elle aussi d’indiquer directement le lexique français utilisé pendant le cours à l’étudiant, qui s’exprime ainsi à ce propos: « (…)j’ai aussi besoin des mots, si l’interprétation est trop imagée je ne sais plus de quel mot français j’ai besoin pour exprimer ce concept par écrit. »
La fréquence élevée de ces deux tactiques met en exergue la prise en compte par les interprètes dans notre corpus d’un besoin de l’étudiant qui va au-delà de la communication immédiate. Compte tenu de leur coût en temps et en ressources attentionnelles, elles sont souvent choisies par l’interprète en fonction de son appréciation de l’importance du terme français pour l’étudiant sourd (récurrence de l’utilisation du mot dans le discours de l’enseignant, interaction de l’étudiant avec l’interprète).
Exemple : segment : [part du gâteau] + S.E.G.M.E.N.T + labialisé « segment »
Tout en restant dans une interprétation imagée, l’interprète revient vers le discours original français pour signifier que le terme qui est utilisé par l’enseignant et que l’étudiant retrouvera à l’écrit sera précisément le terme « segment. »
D’un autre côté, la présence trop appuyée de la dactylologie nuit à la compréhension, comme le suggère l’extrait suivant de l’interview de l’étudiant :
Il y a plusieurs années j’avais un module de droit à passer pour mon BTS de comptabilité et l’interprète dactylologiait presque tous les concepts. Le cours durait trois heures. C’était impossible, je ne pouvais pas suivre en regardant les mots s’épeler, alors j’ai dit au responsable qu’on ne pouvait pas travailler comme ça.
Il est à noter que la dactylologie prend bien plus longtemps que l’expression par signes lexicalisés. Par un mécanisme expliqué dans le cadre du Modèle d’Efforts de la simultanée (Gile 2009), le retard qui en résulte peut conduire à une surcharge de la mémoire à court terme, puis à des pertes. Lors d’une étude plus récente non encore publiée, nous avons remarqué une tendance des interprètes à omettre le segment de discours qui suivait le segment dactylologié. Notons aussi que la dactylologie entraine une sortie de l’espace de scénarisation pour y introduire un élément d’une chaine linéaire qui va certes expliciter un concept, mais qui est du fait de sa forme étranger à cet espace et à sa logique. L’intégration du concept dans le flux de l’interprétation sera un élément supplémentaire à gérer par l’interprète : la gestion du message se fera par deux canaux différents, ce qui peut entraîner une surcharge cognitive et la perte de l’information suivante dans le discours.
(3) Emprunt adaptatif à la LSF : Emploi d’un signe existant investi d’un nouveau sens. (21 occurrences)
Un signe existant en LSF est emprunté et investi d’un sens nouveau, généralement spécialisé (ici dans le domaine du contrôle de gestion). Dans notre corpus, la labialisation est majoritairement associée à ce procédé (dans 50 pourcent des cas). En revanche, la dactylologie n’y est associée qu’une seule fois.
Exemple d’emprunts utilisés :
Ex : Coût/prix/tarif/montant, signés de la même façon. L’interprète y a associé la labialisation pour les différencier en contexte. L’emprunt induit un sens proche mais non exact, et l’étudiant a la possibilité de suivre ou non sur les lèvres pour comprendre, par exemple, que c’est bien du mot coût qu’il s’agit.
Cette tactique a également été utilisée pour différencier qualité/performance/efficience/efficace, qui se signent de la même façon.
En revanche, pour des termes comme ménage traduit par couple, sénior par vieux, carence par manque, ou quantitatif par chiffres, l’ILS (interprète en langue des signes) n’a associé aucune autre tactique à l’emprunt adaptatif.
Ces emprunts sont en majorité extrêmement simplificateurs et ne transmettent qu’une partie du concept ; dans le corpus, la moitié d’entre eux sont accompagnés de la labialisation du terme exact français sans dactylologie. La labialisation sert à distinguer les signes : faute de mieux, ratio sera différencié ici de pourcent par l’information labiale.
(4) Scénarisation (18 occurrences)
Très largement utilisée par les interprètes, la scénarisation crée des saynètes qui condensent le sens du discours. Comme le montre l’exemple ci-dessous, une scénarisation peut comprendre un signe issu lui-même d’une scénarisation préalable.
Exemple:
Actionnaire : [personne] + [coupon détaché] + [acheter]
Ici, le signe [action] avait été au préalable créé par l’étudiant et l’interprète suite à la définition du mot et à une référence faite par le professeur (autrefois, les actions se matérialisaient par de larges feuilles de papier qui se découpaient selon les pointillés). Cette information facile à scénariser a été choisie par l’étudiant sourd pour désigner action d’entreprise (signé littéralement papier que l’on sépare de sa souche). C’est naturellement que [action] se retrouve dans le signe de [actionnaire] en tant que point de départ d’une nouvelle scénarisation. Hors contexte et en partant du signe [ticket], il serait difficile de remonter jusqu’au terme actionnaire. De nombreux signes ainsi créés ne sont compris que parce qu’ils renvoient à un « connu partagé » par l’étudiant et l’interprète (voir à ce sujet Jeggli 2003). L’on trouve parfois sur le terrain une dizaine de signes pour un même terme, car ils ont été créés en même temps par différents binômes étudiants sourds/ILS. Ces signes n’ont pas vocation à se diffuser. Les tactiques de l’interprète face au vide lexical prennent donc un peu le caractère d’un éternel recommencement.
La scénarisation, souvent présentée comme la solution de choix au vide lexical, demande un effort de réflexion lors de son élaboration, et sa mise en place requiert une conceptualisation rapide et efficace du signifiant. Dans les faits, elle est parfois laborieuse, avec de « faux départs » qui peuvent aboutir à son abandon au profit d’une interprétation plus linéaire, proche du français signé.
Les remarques suivantes sont extraites d’un travail de recherche en cours. Elles ont été enregistrées lors d’un focus group réalisé avec des étudiants interprètes en Master 2, dont l’un des objectifs était d’identifier les difficultés liées à la scénarisation en interprétation simultanée.
« Ma difficulté, c’est que j’ai du mal à créer des interactions qui n’existent pas dans le discours. »
« C’est difficile quand tu ne trouves pas tout de suite le cas concret pour représenter (visuellement le discours). »
« On prend du retard pour scénariser, on le fait et du coup on perd l’information qui vient. »
« Le fait de devoir passer par des transferts personnels et scénarisations, je m’aperçois que parfois ce n’est pas possible en simultanée. »
« J’ai tendance à favoriser le contenu à la forme (scénarisée), à rester très collé au discours, car je ne veux rien laisser (…). »
Par ailleurs, le placement spatial des éléments du discours signé par l’interprète sollicite un effort de mémorisation supplémentaire des emplacements dédiés, dans la perspective de leur activation ultérieure. Par souci de clarté, l’ILS fera attention à ne pas tout placer au même endroit : les actionnaires à droite, la filiale à gauche, les sous-traitants au milieu, les fournisseurs légèrement en hauteur, dans le respect d’une logique communément partagée (Dieu est en haut et les hommes en bas). Si un même placement appelle plusieurs éléments, l’ILS est souvent contraint de renommer l’élément qu’il réactive. Cet effort de mémorisation est conscient et le corpus nous montre que les ILS doivent se concentrer pour retrouver un emplacement ou le corriger, alors que parfois, seules deux entités sont positionnées. En cela, l’Effort de mémoire à court terme dans le Modèle d’Efforts de la simultanée (voir plus haut) comporte en ILS un élément que l’on ne trouve pas en interprétation entre des langues vocales.
D.-C. Bélanger (1995) suggère de placer au même endroit certaines catégories d’entités (les éléments masculins à droite et les féminins à gauche, les entités à droite et les personnes à gauche) dans une optique d’automatisation de la production. Sachant que l’ILS n’a aucun pouvoir sur le discours de départ et qu’il ne connaît pas son contenu à l’avance, la chose est difficile, car il peut y avoir plusieurs entreprises, plusieurs personnes, plusieurs filiales. De plus, cette contrainte entrave l’appropriation du discours par l’ILS qui aurait naturellement placé une entité à gauche ou à droite selon l’organisation et la logique de son propre espace de signation.
(5) Translittération ou français signé (14 occurrences)
Le ‘français signé’ consiste à plaquer sur la langue des signes la structure syntaxique du français. Si certaines langues des signes l’intègrent plus naturellement (l’AUSLAN, langue des signes australienne, ou l’ASL, langue des signes américaine, par exemple), il en va tout autrement avec la LSF.
Exemple, interprétation n°1 :
Panier moyen : [anse de panier] + [moyen]
L’interprète et l’étudiant savent qu’il ne s’agit pas dans ce contexte de l’objet ‘anse de panier,’ mais une périphrase serait longue et l’étudiant connaît déjà le concept. La translittération présente ici l’avantage de la rapidité et du lien direct au français.
L’étudiant lui-même propose : « Pour le coût de revient on est obligé de faire du français signé, je ne vois pas d’autres solutions. Idem pour coût de distribution et coût d’approvisionnement. »
Le recours au français signé est ici un choix de l’interprète et de l’étudiant. Dans ce cas précis, pour tous les deux, le respect de la forme linguistique de la langue des signes est moins important que le rappel de la forme française. Napier (2002) parle aussi des préférences des étudiants sourds pour une forme d’interprétation plutôt littérale où plutôt iconique. A la suite d’une expérience menée auprès d’étudiants sourds, elle propose le concept de translational contact comme forme idéale de traduction de contenus universitaires mêlant la littéralité et l’iconicité. Dans notre corpus également, la littéralité de l’interprétation est bien un choix et non pas le résultat d’un défaut de scénarisation.
(6) Périphrase (10 occurrences)
La périphrase est utilisée seule, sans labialisation appuyée ni dactylologie ; c’est une parenthèse introductive au concept. Nous remarquons aussi que dans le corpus, l’emploi de cette tactique pour des mots non techniques comme formel, optimiser, normatif, chiffres ronds, logistique, répondait à des besoins immédiats de l’étudiant apparus à travers un regard interrogateur pendant l’interprétation.
Nous avons pu vérifier ce phénomène de feed-back entre l’interprète et l’étudiant lors des quatre enregistrements. Nous rejoignons ici les idées de C. Wadensjö (1998), M. Metzger (1999) et C. Roy (2000), qui mettent en avant le rôle actif de l’interprète en situation d’interprétation de liaison. J. Napier (2006) insiste d’ailleurs elle aussi sur la coopération entre l’interprète et la personne sourde dans l’interprétation de la langue des signes australienne vers l’anglais et rapporte des regards, des hochements de tête et de très courtes interactions qui ne prennent pas de forme linguistique signée à proprement parler.
Exemples de périphrase :
Logistique : [prévoir] + [transport] + [coût] + [quand] + [etc.]
Chiffres ronds : [chiffre] + [12etc.] + [non] + [net] + [zéro au bout] (scénarisé)
Ces exemples illustrent la difficulté de prendre en charge un contenu pédagogique pour pallier le vide lexical. En fait, quand l’interprète scénarise des termes spécialisés, il influence fortement la représentation du concept qu’en aura par la suite l’étudiant.
Nous remarquons également que le temps requis pour signer ces périphrases est relativement important. Dans notre corpus, le discours de l’enseignant étant assez redondant, cette tactique n’a pas entraîné de retard sur l’orateur. En revanche, si les étudiants entendants ont pu profiter de la répétition de l’information par l’enseignant pour mieux l’assimiler, le coût de la tactique en temps d’énonciation n’a permis à l’interprète de traduire qu’une seule fois, et l’étudiant sourd a été privé de cette possibilité.
Autre conséquence de la durée de la périphrase, de courts échanges sont parfois omis, comme dans l’extrait suivant :
« Enseignant : - Pour ce genre d’exercice, exprimez les résultats en chiffres ronds. »
« Un étudiant : - Pour l’exercice 2 et 3 ? »
« Enseignant : - Oui, les deux. »
L’interprète a omis l’échange par manque de temps, l’interprétation de chiffres ronds lui ayant pris de précieuses secondes, et a interprété : « pour ce type d’exercice, il faut donner le résultat en chiffres ronds pour l’exercice 2 et 3 ». Dans cet exemple, les explications de l’enseignant sont transmises en totalité, mais l’omission des échanges peut donner à l’étudiant sourd la fausse impression que les autres étudiants n’ont pas de questions ou interviennent peu en classe.
4.2.2 Tactiques peu fréquentes :
(1) Pointage visuel (par exemple, pointer un élément écrit au tableau).
(2) Signer les initiales du mot français, par exemple [C] et [D] dans un espace redessinant un journal comptable pour crédit et débit respectivement.
(3) Siglaison
(4) Enumération de quelques éléments appartenant à un ensemble pour représenter celui-ci.
(5) Labialisation d’un sosie ou proche parent labial.
Par exemple, immobilisation est signé comme [immeuble] et labialisé. Ce signe, créé par l’étudiant, a été choisi en raison de la similitude de sa prononciation labiale et de celle d’un autre mot français (immeuble) et parce qu’une immobilisation comptable peut entre autres porter sur un immeuble. Cette lexicalisation temporaire est essentiellement subjective et propre à l’étudiant. C’est la raison pour laquelle elle est peu présente lors de l’interprétation vers la LS alors qu’elle l’est beaucoup plus de la LS vers le français. Le chemin qui a conduit l’étudiant à ce signe précis suit sa logique personnelle et celle de sa reconnaissance labiale. Il appartiendra à l’interprète de s’en souvenir et de suivre la même logique pour restituer correctement ses propos lors des échanges.
5. Discussion et conclusion
Dans cette étude de cas, la première du genre à notre connaissance, un premier phénomène digne d’attention est la fréquence élevée du vide lexical dans le corpus (107 termes français sans correspondance lexicalisée en LSF sur moins de 5 heures de discours). Ce phénomène semble distinguer assez nettement l’interprétation en langue des signes de l’interprétation entre langues vocales.
Quant aux tactiques les plus fréquentes, on note que si la labialisation est rapide, la deuxième tactique la plus fréquente, à savoir la dactylologie, est chronophage et d’une efficacité incertaine. Non seulement dans près de la moitié des cas dans notre corpus, elle a été répétée parce que orthographiquement incorrecte, maladroite ou trop rapide pour l’étudiant, mais dans 45 % des cas elle est associée à une omission du segment de discours suivant, peut-être en raison du retard pris et d’un déficit attentionnel lié à la saturation de la mémoire de travail de l’interprète (Gile 2009, chapitres 7 et 8). Ce phénomène est particulièrement flagrant dans l’enregistrement du quatrième cours, où le segment suivant la dactylologie est omis dans près de 64 % des cas. Et pourtant, elle est souvent utilisée. Est-ce à dire que la loi de la minimisation des interférences ne s’applique pas en interprétation en langue des signes française ? Nous penchons plutôt pour une autre explication, celle de l’importance accordée par l’interprète à une information translinguistique : au-delà du message sémantique que véhicule le discours original, il donne la priorité à la transmission d’une information sur le terme français en raison des besoins particuliers de l’étudiant en classe d’entendants. Il arrive que des informations sur le mot en langue de départ soient également transmises dans l’interprétation entre langues vocales, mais la chose est relativement rare. La fréquence élevée de cette tactique chez les ILS est une illustration frappante de l’importance de la fonction du discours traduit dans les choix du traducteur ou interprète et vient appuyer la théorie du skopos (Reiss et Vermeer 1984/1991), qui, justement, postule l’importance primordiale de la fonction de chaque traduction (son « skopos ») comme déterminant de la manière dont le traducteur composera son texte. Les interprètes intervenant de plus en plus en milieu pédagogique, il apparaît donc intéressant, dans une optique d’optimisation des cursus de formation, d’explorer plus avant les difficultés rencontrées sur le terrain dans cet environnement.
Enfin, le corpus met en relief l’existence d’une tension entre l’aspiration de la communauté sourde française à préserver la LSF d’une interférence du français et l’intérêt de la communication dans certaines situations concrètes. Une tension analogue se retrouve d’ailleurs dans la résistance du français à l’influence de l’anglais dans des domaines de spécialité. Le japonais, en revanche, intègre depuis longtemps des termes étrangers jusque dans le langage quotidien sans que cela semble avoir une influence néfaste sur sa richesse lexicale, syntaxique et stylistique propre.
L’étude de cas présentée ici ne saurait être que le début d’une exploration systématique du comportement des ILS face au vide lexical, exploration qui, si elle est conduite dans différents cadres et situations de communication, devrait apporter des éléments précieux d’appréciation des différentes tactiques et de leurs effets.
Références
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paper presented to the Theoretical Issues in Sign Language Research Conference. Florinopolis, Brazil, December 2006. 40 pages. - Pournin, Sophie(2009). L’interprétation du vide lexical des domaines de spécialité, une étude de cas. Mémoire de M2 Recherche en Traductologie non publié. Paris, ESIT, Université Paris 3.
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Emissions en LSF
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http://www.dailymotion.com/video/x9v3n4_l-oeil-et-la-main-interpretes-trans_lifestyles
(consulté 01.03.2011). - LSF sur le Web
http://ufr6.univ-paris8.fr/desshandi/supl/projets/site_lsf/accueil/accueil.php (consulté 01.12.2011).
Annexe : unités lexicales utilisées dans le discours français n’ayant pas d’équivalent lexical standard en LSF
Avertissement
1. La liste ci-dessous comporte moins de 107 mots distincts, certains, polysémiques ayant été comptabilisés séparément pour chacune de leurs acceptions.
2. Elle comporte également certains termes ayant des équivalents standard en LSF, quand ceux-ci ont été utilisés pour rendre un autre terme français et ne sont donc plus disponibles dans l’équivalence habituelle. Par exemple, le terme fiscalité est en général traduit en LSF par le signe désignant l’impôt, mais dans le corpus, ce signe prend son acception au sens strict, ce qui exclut son emploi pour fiscalité. Il en est de même pour les signes [investissement] et [financement].
3. On trouve dans cette liste des concepts habituellement traduits par un signe non spécialisé ou une périphrase qui ne sauraient être utilisés ici en raison de l’exigence de précision qui se pose dans le contexte de ces cours de contrôle de gestion.
4. Enfin, quatre termes anglais (en italiques), utilisés dans le discours français pendant les cours, ont été inclus dans la liste pour cette raison.
Amortir, Analyse quantitative, Approche qualitative, Business to client, Carence du marché, Cession, Charge variable/fixe, Chiffre rond, Clés de répartition, Coefficient multiplicateur, Cotation, Coût, Coût complet, Coût partiel/de revient/de distribution/d’approvisionnement, Coût standard, Diagnostic, Diagnostic interne/externe, Données, Economies d’échelle, Effectif, Efficace, Efficience, Entrée de gamme, Filiale, Flux, Fonds de roulement, Formel, Gamme, Imputation, Imputation rationnelle (des charges), Immobilisation, Inconvénients, Indicateur de performance, Indice, Investir, Investissement, Logistique, Management, Mapping concurrentiel, Ménage, Méthode du coût complet, Méthode transactionnelle, Mixed products, Mobilisation/immobilisation, Montant, Nitrate, Niveau d’activité, Normatif, Notion, Notion immatérielle/matérielle, Optimiser, Quantitatif, Panel, Panier moyen, Performance, Prix, Prix de revient majoré, Prix de transfert, Produit mature, Produit niche, Produits standardisés, Ratio, Répartition du marché, Reporting, Résultat d’exploitation, Segment, Seuil de rentabilité, Sénior, Snacking, Tableau de bord, Taille critique, Tarif, Taux de pénétration, Transversal, Unité de vente consommateur.
Biographies
Sophie Pointurier Pournin is a French sign-language interpreter. She was trained at ESIT where she now teaches. At the same time, she is working on a PhD in interpreting. Her research interests include the lexical gap phenomenon in French to French Sign Language interpreting and interpreting tactics.
Contact: sophie.pournin@hotmail.fr
Daniel Gile is a former scientific and technical translator and presently works as a conference interpreter. He is also professor at ESIT, Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle where he teaches translation, conference interpreting and research methods. His academic training includes degrees in mathematics and sociology, a PhD in Japanese and a PhD in linguistics, and his research interests are cognitive aspects of interpreting, translator and interpreter training, training in research methods and Translation Studies as an object of research. Contact: daniel.gile@yahoo.com
Note 1:
Nous employons le terme 'vide lexical ' pour désigner l’absence d’une correspondance lexicale d’une langue à l’autre dans une situation de traduction, et non pas pour suggérer un manque lexical quelconque dans l’absolu. Notre usage du terme est conforme à celui de lexical gap dans la littérature, par exemple dans Bentivogli et Planta (2000).
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